
Je voyais au départ ce texte comme un chouette exercice. Parler d’espoir, se livrer, mettre des mots sur des pensées… un exercice introspectif pas facile mais intéressant. Puis l’actualité internationale m’a rattrapée : les conflits, les abus, l’injustice, la planète, les féminicides, le génocide. J’ai été submergée par un désespoir infini. Comment le monde peut-il aller aussi mal ? Est-ce qu’on peut vraiment réussir et contribuer à un mieux ?
L’exercice s’est alors transformé en quelque chose de plus sérieux. Est-ce que ce que je veux partager ici m’aide réellement à garder espoir, à continuer à avancer ? C’est le doute qui a pris le dessus. Au fond, ce que je veux écrire est peut-être bête, privilégié, utopiste, inutile, naïf. « Naïve ». Un mot qui m’a souvent été attribué, comme si croire à un possible, aux bonnes intentions, c’était faire preuve d’idiotie, de niaiserie. Et puis écrire, c’est aussi se montrer vulnérable. Après des discussions avec mes proches et avoir procrastiné cette rédaction pendant un temps, je me suis lancée. Ce que je partage ici ne résonnera peut-être pas chez tout le monde mais il me tenait à cœur de contribuer à cet effort collectif que représente, à mon sens, ce numéro (et, si possible, diffuser un peu d’espoir et d’ondes positives en cours de route).
J’ai 27 ans. Je suis quelqu’un qui a tendance à voir le verre à moitié plein, à chercher des solutions aux problèmes rencontrés, à essayer de garder une certaine appréciation et un émerveillement pour les choses qui m’entourent – aussi petites soient-elles. Paradoxalement, je suis aussi une personne anxieuse, soucieuse de la finalité des choses, apeurée par les conséquences du changement climatique, complètement atterrée par l’inhumanité dont on fait souvent preuve. Dans ces cas de doute, de colère, de tristesse voire de désespoir, je me raccroche à des éléments basiques mais vitaux.
je choisis de me focaliser sur ce qu’il est possible de faire
La première chose que je fais, c’est de me tourner vers mes proches. Ils sont un sas de décompression, un refuge où je peux partager ce que je ressens. Mais surtout, ils m’aident à prendre du recul, à entrevoir quelque chose de meilleur. Ils me poussent aussi à me dépasser, à sortir des sentiers battus, à envisager ce que je pourrais mettre en œuvre pour aller là où j’ai envie d’aller. Me tourner vers eux, c’est arriver abattue pour repartir plus confiante, c’est être accompagnée.
Autre élément : se concentrer sur les choses positives qui arrivent, parfois toutes petites. Elles peuvent sembler (ou être) futiles et n’avoir aucun impact sur le monde et ses problématiques. Ces petites choses sont pourtant si importantes à mes yeux, puisqu’elles contribuent à rendre notre quotidien moins triste et morose, elles peuvent nous faire du bien et nous aider à avancer. Ça peut être un moment passé entre amis, une journée ensoleillée, notre film préféré, un acte de solidarité, un moment bienveillant entre deux inconnus, manger un bon repas, observer les paysages et couleurs qui nous entourent… Continuer à apprécier les petites choses, continuer à s’émerveiller. Je pense que c’est une des clés vers notre humanité.
« Deux enfants qui couraient sur la terre en trébuchant sur leurs propres ailes, mais qui ont toujours continué à avancer avec cette certitude inébranlable que le monde a plus que jamais besoin de grandeur, de voyages, de cœur et d’esprit. « La poésie sauvera le monde », criaient-ils. Alors vous aussi, n’oubliez jamais : il y aura toujours un refuge quelque part, un endroit secret dont vous seul aurez la clé, un royaume d’enfant qu’aucun pas n’aurait foulé, où l’imaginaire est roi. Où que vous soyez, quoi que vous traversiez, il sera toujours possible de trouver dans ce monde de l’enchantement, de faire triompher la poésie, la voir partout, jusqu’à devenir soi-même la poésie. » 1
Ce qui me donne de l’espoir (et, égoïstement, ce qui me permet de me regarder dans la glace), c’est d’essayer de réaliser des actions à mon échelle. Même si ce n’est pas suffisant, même si je peux faire mieux, même s’il faut évidemment que cela passe au niveau des organismes internationaux pour qu’il y ait un réel changement. Je me dis que les petits actes que je pose, les projets auxquels je participe, que je partage, l’argent que je donne, c’est utile d’une manière ou d’une autre. Et si je peux, par la même occasion, entraîner d’autres personnes, alors j’aurai réussi mon pari.

Et puis, en définitive, je choisis (mais j’ai aussi besoin quelque part) de voir le verre à moitié plein, d’estimer que l’humain est capable du bien, qu’il n’est pas intrinsèquement mauvais, de faire confiance aux gens, de me dire que c’est possible, que je ne suis pas seule à essayer, que ça sert à quelque chose. Tant pis si je passe pour quelqu’un de « naïf » ou d’« utopiste ». Je ne nie pas les événements tragiques qui se déroulent chaque jour dans le monde, je choisis de me focaliser sur ce qu’il est possible de faire. Car après tout, ce serait perdre notre temps que de ne cesser de contempler combien le monde va mal – déjà parce qu’on en est conscient, mais surtout parce que ça n’apporte rien si ce n’est une grosse déprime. Et puis, il y a toujours une chance d’apporter notre aide, notre contribution et d’essayer de changer les choses. Alors, pourquoi ne pas le tenter ?
« Ce qu’il faut comprendre, c’est que pour aller mieux, le monde n’a pas besoin que de quelques personnes qui fassent les choses parfaitement. Il a besoin que plein de personnes essayent d’en faire même si ça reste imparfait. […] Alors si tu trouves que dans ce monde, plus rien n’a de sens, la seule chose que t’as à faire, c’est d’en donner un. […] Et même si les pessimistes ont raison et que tout est foutu, au lieu de déprimer sur place en bavant face à la fin qui approche, on vivra mieux le temps qu’il nous reste en lui donnant du sens. Donc finalement, la seule question qui mérite d’être posée, c’est qu’est-ce que nous allons faire du temps qui nous est imparti ? » 2