De la désillusion politique au réenchantement démocratique

Par Michaël Bisschops
président des Territoires de la Mémoire

Nous lisons un peu par­tout, en gros carac­tères, que cette « super année élec­to­rale » serait celle de tous les dan­gers. Mais ne pourrions-nous pas plu­tôt y voir une oppor­tu­ni­té pour rendre de l’éclat à notre démo­cra­tie ? De la dés­illu­sion poli­tique au réen­chan­te­ment démo­cra­tique, il n’y a qu’un pas que nous allons fran­chir ensemble.

L’actualité nous montre à pro­fu­sion que le ter­reau est par­ti­cu­liè­re­ment fer­tile pour l’extrême droite. Nous sommes témoins d’une bana­li­sa­tion et d’une per­co­la­tion crois­sante de ces idéo­lo­gies, nous sommes témoins d’un racisme latent et décom­plexé, nous sommes témoins d’une pola­ri­sa­tion gran­dis­sante des idées et des dis­cours, mais sur­tout nous vivons une période de décep­tion de plus en plus mar­quée envers le politique.

Les rai­sons de la mon­tée de l’extrémisme sont mul­tiples : la mécon­nais­sance du poli­tique et de notre sys­tème ins­ti­tu­tion­nel, le manque de confiance envers les poli­ti­ciens, et une inef­fi­ca­ci­té per­çue géné­rant une frus­tra­tion qui peut conduire à la recherche de solu­tions plus radi­cales. De plus, le rejet de la culture du com­pro­mis, la per­cep­tion d’une absence de repré­sen­ta­tion des pré­oc­cu­pa­tions citoyennes, et un sen­ti­ment d’impuissance face à l’action poli­tique actuelle sont autant de catalyseurs.

Le désen­chan­te­ment et la dés­illu­sion démo­cra­tique peuvent ouvrir la porte à des lea­ders auto­ri­taires qui exploitent le filon de l’affect et des émo­tions, plu­tôt que de pro­mou­voir un dia­logue sain, serein et construc­tif. La tolé­rance envers des formes d’extrémisme per­çues comme étant un « mal néces­saire » peut conduire à des conclu­sions inquié­tantes, notam­ment en jus­ti­fiant de telles per­son­na­li­tés poli­tiques. Les résul­tats de l’enquête « Noir Jaune Blues » sont encore bien pré­sents dans nos mémoires. Nous devons ana­ly­ser les rai­sons der­rière ces per­cep­tions, tra­vailler acti­ve­ment à com­battre les racines de l’extrémisme et conti­nuer de décons­truire le mythe selon lequel ce type de lea­ders appor­te­raient des solu­tions simples et mira­cu­leuses à des pro­blèmes per­çus comme non réso­lus par les poli­tiques en place.

À l’aube des élec­tions, l’inquiétude est donc bien réelle… Mais en miroir de nos inquié­tudes, il y a l’espoir ! L’espoir non comme une simple for­mule de style, mais l’espoir en tant que pers­pec­tive men­tale. L’espoir d’une recon­quête du champ démo­cra­tique. Mais comment ?

Tout d’abord, en accep­tant l’indignation comme moteur de l’engagement citoyen. Cela résonne puis­sam­ment à tra­vers le temps, aus­si per­ti­nem­ment aujourd’hui qu’il y a trente ans. Cette indi­gna­tion trouve son essence dans le sen­ti­ment de colère sus­ci­té par des actions qui heurtent notre conscience morale et notre sens de la jus­tice. Cette émo­tion est com­plexe – à la fois construc­tion intel­lec­tuelle et réac­tion émo­tion­nelle – et puis­sante car elle nous incite à nous lever et à agir face à l’injuste. Elle ne se limite pas à une simple mani­fes­ta­tion de mécon­ten­te­ment ; elle incarne une urgence de l’exigence, un appel à la jus­tice et à la rec­ti­fi­ca­tion d’une situa­tion sociale. En com­pre­nant sa nature mul­ti­di­men­sion­nelle, nous sai­sis­sons plei­ne­ment son poten­tiel en tant que force motrice de l’engagement.

Fon­der l’indignation en tant que moteur de l’engagement citoyen n’est pas tout. Le faire sur base des ensei­gne­ments du pas­sé revêt d’une impor­tance stra­té­gique. Pour­quoi cette abso­lue néces­si­té de connaitre notre His­toire ? Pour ne pas réité­rer les mêmes erreurs, les mêmes hor­reurs. Pour extraire les ensei­gne­ments issus des luttes anté­rieures, des résis­tances pas­sées, et des moments où l’indignation a ser­vi de cata­ly­seur à des trans­for­ma­tions signi­fi­ca­tives. La résis­tance actuelle doit, par consé­quent, s’ancrer pro­fon­dé­ment dans les réso­nances his­to­riques, éta­blis­sant ain­si un conti­nuum tem­po­rel per­met­tant de contex­tua­li­ser et de légi­ti­mer les mou­ve­ments contem­po­rains d’indignation.

Ce qui pré­cède nous amène tout natu­rel­le­ment à la dyna­mique de l’engagement. Le silence n’est pas une option, et faire entendre sa voix devient, dès lors, une néces­si­té impé­rieuse pour trans­for­mer notre rôle pas­sif de citoyen en celui d’acteur essen­tiel de notre démo­cra­tie. Cette trans­for­ma­tion marque la fin du citoyen consom­ma­teur ou spec­ta­teur poli­tique, le repla­çant au cœur de la pro­duc­tion et de la conduite des chan­ge­ments sociaux. L’objectif ultime : encou­ra­ger la construc­tion d’une socié­té libre, démo­cra­tique et soli­daire, où chaque citoyen, ins­pi­ré par une indi­gna­tion éclai­rée, contri­bue acti­ve­ment à l’écriture col­lec­tive de notre his­toire démocratique.

Porte-voix…de l’intime au politique !

Je m’appelle Michaël Bisschops

Je suis Pré­sident des Ter­ri­toires de la Mémoire

J’EXIGE d’obtenir des pro­po­si­tions concrètes, des actions tan­gibles et une réponse… du poli­tique à l’intime !

À par­tir de là, ensemble, avec déter­mi­na­tion, avec convic­tion et avec audace, nous pour­rons réen­chan­ter notre démocratie…

Sommaire du numéro